Les leçons du périple royal
Le voyage du Roi Mohammed VI aux pays du Golfe vise avant tout à réactiver les promesses des monarques arabes dans le cadre du CCG. Le bilan est positif, mais….
Le Roi a joué la carte des clubs des monarchies arabes. Une carte que lui seul peut manier, vu les relations amicales et historiques qu’il entretient avec les rois de la région. D’ailleurs, point de Abdelilah Benkirane dans ce voyage qui a conduit Mohammed VI à 5 pays (Arabie Saoudite, Jordanie, Emirats Arabes Unis, Qatar et Kuwait).
Les difficultés budgétaires par lesquelles passent le pays nécessitent une accélération de l’action même si celà doit passer par une mise en avant du Roi, quand bien même la présence du Chef du Gouvernement aurait été un excellent message et un symbole fort d’une vraie collaboration entre le Roi et son co-pilote. Le quator des conseillers royaux (Nasri, Zenagui, El Himma et Azzimane) a lui-même présidé la table des négociations, spécialement en Arabie Saoudite. La réalité est que Benkirane ne pourra pas faire le poids devant les monarques arabes qui tiennent à avoir, plus qu’un interlocuteur officiel, un confident de leur calibre. Surtout que le Maroc ne part pas au Moyen-Orient dans une position de force. C’est vrai qu’il a une bonne image internationale à vendre, mais le déplacement royal vise avant tout à trouver des financements au train de développement de l’Etat presque à l’arrêt, avec en plus, la négociation de gros contrats de cession d’entreprises comme la RAM et, par la même occasion trouver le montage idoine pour la sortie de Vivendi du capital de Maroc Telecom. Dans le panier des projets marocain en quête de financement: le Plan Maroc vert, la suite des centrales solaires du Masen qui sont en souffrance, le TGV mais aussi la santé et le tourisme.
Après les promesses, de fortes promesses…
Mais qu’en est-il concrètement? Dans une déclaration à Reuters, Yassir Zenagui révèle sans détour qu’aucune somme d’argent n’a été encore décaissée dans le cadre du don de 5 milliards de dollars sur 5 ans accordé par le CCG et s’attend à ce que les premiers décaissements se fassent le premier trimestre 2013. «Le but de la visite royale est de présenter des projets concrets avec des budgets et des études de faisabilité. Nous travaillons sur ce qui a déjà été convenu et exécutons ce qui a déjà été décidé par le CCG», a t-il dit.
C’est donc un déplacement pour presser les monarchies pétrolières à passer à l’action. L’annonce du groupe émirati Taqa d’injecter 13 milliards de dirhams dans 2 unités de Jorf Lasfar est une vieille information qui date de 2009 et dont la promesse a été juste réactivée pendant ce voyage royal. Même chose pour les financements Koweitiens et Qataris dans le fonds toursitique «Wissal» ou encore le TGV qui sont jusqu’au jour d’aujourd’hui des promesses «virtuelles».
Pour résumer, le Roi est parti pour concrétiser des promesses et il est revenu avec…un engagement à réaliser ces promesses, à part peut-être cette assurance saoudienne de décaisser sa part de 1,25 milliard de dollars du méga don khaliji.
Malgré des défaillances dans la communication politique avec les media de la région et internationaux, ce voyage reste un bon signe politique qui placera le Maroc comme plateforme de dialogue régional, conformément à la volonté des USA. Il est clair que la connivence qui commence à marquer les relations marocco-américaines visent à faire du Maroc un acteur régional avec une mission stratégique, qui comprend aussi le partenariat militaire. Le déplacement du Roi au camp des réfugiés syriens de Zaâtari, la première d’un souverain arabe, est un bon signe de l’engagement du Maroc contre Bachar El Assad. D’ailleurs, dans ce voyage au Golfe, le Roi a été accompagné de deux généraux, en plus du chef de la DGED. Le deal économico-militaire est donc tracé, et c’est une composante à laquelle il faudra prêter un grand intérêt.