Les industriels au rendez-vous
Du 19 au 22 septembre s’est tenu le salon SISTEP-MIDEST, l’occasion pour les industriels marocains et internationaux de se rencontrer. Cette année, les étrangers dominent les stands, attirés par la stabilité et les opportunités qu’offre le marché industriel marocain.
«C’est une honte!», se plaignaient les exposants chinois, français ou espagnols au salon SISTEP-MIDEST, excédés au bout d’une journée par l’insoutenable chaleur qui étouffait l’espace de la foire internationale de Casablanca. Sans air conditionné, l’ambiance aurait presque pu tourner au vinaigre, si le ministre de l’Industrie, Abdelkader Aâmara, ne s’était pas attardé à chaque stand, au cours d’une balade de plus d’une heure, suivi au pas par une horde de journalistes et de chargés de communication. Souriant et communicatif, Monsieur le Ministre a honoré sa visite de courtoisie, donnant à l’inauguration du salon, jeudi 19 septembre, un air d’efficacité.
Toutes les affiches le rappellent: c’est LE rendez-vous des industriels. Depuis dix ans, SISTEP réunit petits et grands, locaux et étrangers. Tôlerie, plasturgie, machines-outils, électronique, services et sous-traitance, autant de spécialités soigneusement rangées par nationalité, si bien que l’on ne se perd même pas à courir les 6.000 m² de la foire. L’année dernière, le salon avait accueilli 4.000 visiteurs professionnels «aux fonctions décisionnaires», ainsi qu’une soixantaine de donneurs d’ordre africains et européens. L’édition 2012 a mis les bouchées doubles, mais a oublié de mettre la clim’ en marche.
Du fait de la proximité de l’une et du poids économique de l’autre, l’Europe et la Chine présentaient le plus grand nombre d’exposants. A leurs côtés, l’Algérie, la Tunisie et la Turquie affichaient leurs couleurs nationales. A la rencontre de leurs homologues marocains, les industriels réunis à Casablanca ont chacun leurs raisons d’y être représentés. Ce salon, c’est aussi l’occasion de dresser le bilan du secteur. Un certain Karl Marx n’avait-il pas énoncé que l’histoire de l’industrie est le livre ouvert des facultés humaines ?
Les industriels étrangers, sensibles aux atouts du Maroc
«L’économie d’un pays ne peut pas se passer de son industrie», rappelle Abdelhamid Souiri, président de la Fédération des Industries Mécaniques, Métallurgiques et Electromécaniques (FIMME). Après une année 2009 difficile, le secteur a en effet progressivement repris des couleurs, attirant de plus en plus d’investissements directs étrangers (IDE). Une hausse de plus de 60% d’IDE entrants a été enregistrée l’année dernière, face à une moyenne mondiale de 16% et de 11% au niveau des pays en développement.
Le Haut-Commissariat au Plan annonçait, avant la tenue du SISTEP, que l’indice de la production des industries manufacturières a enregistré une hausse de 1% au cours du deuxième trimestre 2012 par rapport à la même période en 2011. Si les industries chimiques ont baissé de 2,2%, et les produits métalliques de 2,5%, d’autres branches du secteur telles que les machines et équipements ont enregistré une légère hausse de 1,4%.
Ainsi le salon SISTEP-MIDEST s’inscrit dans une conjoncture économique d’émergence, favorable à l’investissement étranger. En témoigne le nombre d’exposants internationaux présents cette année: Ils étaient 60% à tenir leurs stands aux côtés des exposants marocains, tandis que l’édition 2011 ne comptait que 8,5% d’étrangers.
La présence en force des Européens s’explique à la fois par les relations d’affaires qu’entretient le Royaume depuis fort longtemps avec le Vieux Continent, mais également par un contexte de crise économique qui pousse les industriels à viser d’autres marchés. «Le marché marocain est émergent, et son industrie est de seconde main, mais sa stabilité est un atout indéniable, qui ajoute à son attractivité», explique Gonzalo Carvajal Gonzalez, directeur des opérations chez Elesa Ingeniera. Présentant les machines-outils que le groupe fabrique, il précise que le changement se fera «petit à petit», mais qu’en tout cas il ne compte pas passer à côté. «Le Maroc reste une base commerciale certaine qui nous ouvre les portes du marché africain», avoue-t-il.
Il en va de même pour les 32 exposants chinois, et on ne peut seulement imputer à l’Empire du Milieu son hégémonie économique de par le monde. Pi Lilei, vice-président général du groupe Jiang Dong, n’hésite pas à relever l’opportunité qu’offre le salon, quoiqu’avec une certaine retenue: «Nous recherchons des collaborateurs locaux pour sous-traiter nos produits et nous permettre de nous implanter en Afrique du Nord».
Et pour cause. Les relations commerciales qu’entretient le Maroc avec ses voisins maghrébins sont également à l’honneur. «Nous sommes présents depuis la création du salon, et il faut noter que la capacité de sous-traitance qu’offre le Maroc est conséquente, notamment dans la transformation mécanique et plastique», rappelle Mohamed El-Hadi Bourkab, manager général de la Bourse de Sous-traitance et de Partenariat algérien. «De son côté, l’Algérie maîtrise l’industrie sidérurgique et pétrochimique, ce qui fait que nos deux pays sont complémentaires. Nous sommes concurrents dans le domaine du plastique et de la mécanique de précision».
Lassaad Ben Jemaa, de la représentation commerciale tunisienne (Tunisia Export), note que son pays n’est pas réellement concurrent du Maroc, mais vise plutôt la complémentarité. «Les exportations marocaines vers la Tunisie ont augmenté de 70%, notamment grâce aux phosphates et à l’électrique, et celles vers le Maroc de 15%, surtout dans l’industrie mécanique et agroalimentaire». Il énonce également que le rapprochement des deux pays n’est pas évident du fait qu’ils ne sont pas limitrophes. «Pour autant, nous visons une approche tripartite Maroc-Tunisie vers d’autres pays africains, notamment la Côte d’Ivoire», précise-t-il.
La Turquie, quant à elle, prenait place pour la première fois au salon SISTEP. Mustafa Karakoç, responsable des ventes du groupe Baykal, explique que son objectif est de s’implanter au Maroc: «Nous sommes encore absents du marché marocain, pourtant nous comptons déjà 70 collaborateurs à travers le monde, notamment en Algérie, en Egypte, et au Nigeria. Le rapprochement récent de nos deux pays a relevé le grand potentiel du Maroc en termes d’acheteurs, et nous souhaitons ouvrir un entrepôt ici dans les mois qui viennent».
C’est donc dans une optique d’ouverture du marché que les autorités souhaitent faire émerger le secteur industriel. Opération réussie pour le ministère de l’Industrie et du Commerce qui, sinon des soucis de climatisation, a fait du salon SISTEP le rendez-vous à ne pas manquer pour qui lorgne l’industrie marocaine.
La niche Maroc est peu exploitéeAbdelhamid Souiri, président de la Fédération des industries métallurgiques, mécaniques et électromécaniques, explique l’enjeu du SISTEP. L’édition 2012 du salon SISTEP compte une majorité d’industriels étrangers. Quelle en est l’ambition ? Où se positionne l’industrie marocaine au niveau mondial ? Quels sont les points faibles du secteur industriel ? |