Le privé en mal de reconnaissance
La formation dans notre pays se démocratise et devient un enjeu capital pour le développement économique et social. Les pays qui ont atteint un niveau élevé de développement ont très tôt compris que la croissance économique et la prospérité sociale n’ont de chemin que celui qui englobe la formation comme composante principale.
Le Maroc, quant à lui, est toujours, réforme après réforme, échec après échec, plan après plan, à la recherche de la voie la plus adaptée pour sortir le pays des problèmes chroniques d’un système éducatif qui ne répond pas aux exigences du 21ème siècle. En effet, la mondialisation et la globalisation ont poussé le Maroc à adopter une politique d’ouverture et de privatisation entrainant, par voie de conséquence, le développement du secteur de l’enseignement privé.
Encouragé au départ par une défiscalisation non annoncée, plusieurs opérateurs marocains se sont lancés dans cette dynamique avec un esprit de patriotisme, en voulant participer à cet élan de développement de notre pays. Actuellement, cette ouverture s’est élargie à d’autres opérateurs étrangers beaucoup plus attirés par le gain et un secteur en plein boom économique. L’Etat marocain ne doit pas uniquement prendre en compte le volet comptable de l’opération. Il doit essayer de sauvegarder notre système éducatif supérieur comme il le fait pour l’enseignement général. Cet élan a permis le développement d’un système de formation supérieure dans les grandes villes du Maroc. On compte actuellement plus de cent écoles supérieures privées dont seulement une vingtaine avec les normes de grandes écoles (12 sont regroupées sous le label de la Conférence des Grandes Ecoles dont fait partie le groupe HEEC que je dirige). Le développement de l’enseignement privé s’est fait parallèlement au système d’enseignement public. Beaucoup de lacunes restent sans solution.
Pour pallier à cette carence, l’enseignement privé s’est imposé dans le paysage de la formation au Maroc. Très vite, le monde des affaires accorda une reconnaissance totale aux diplômes et aux formations du système de l’enseignement privé. Les raisons de cette reconnaissance sont évidentes : l’adéquation de la formation aux besoins du marché du travail. A titre d’exemple, les lauréats de l’Ecole des Hautes Etudes Economiques et Commerciales de Marrakech du Groupe HEC Marrakech sont rapidement opérationnels. Forts d’un label répondant aux normes internationales, reconnus mondialement par les Universités les plus prestigieuses et le marché marocain, ils intègrent facilement le monde des affaires dès leur sortie de l’Ecole. D’ailleurs, et nous en sommes fiers, plus de 95 % de nos étudiants trouvent du travail au bout de 6 mois après l’obtention du diplôme. 10 % de nos lauréats créent leur propre affaire.
«Avec des diplômes reconnus et des formations équivalentes de l’enseignement privé marocain, une cohésion du monde de la formation régnera et mettra fin à un faux problème appelé concurrence privé-public.»
Plusieurs critères justifient cette reconnaissance du marché du travail : outre l’adéquation de la formation avec les besoins du marché, les écoles privées assurent un enseignement de qualité ; elles privilégient la rigueur et l’exigence du développement humain et surtout une formation répondant aux normes internationales. Nous avons remarqué qu’avec cette reconnaissance, plusieurs groupes étrangers ont intégré l’environnement éducatif marocain sans respect aucun des règles déontologiques. Le ministre de l’Education nationale, de la formation des cadres et de la recherche scientifique a bien précisé qu’aucune autorisation n’a été accordée par son département. Mais le ministère prépare actuellement un cahier des charges pour accorder, en premier lieu , au secteur supérieur privé, une reconnaissance étatique aux diplômes et une équivalence à la formation, en second lieu. Ce type d’accréditation s’impose pour lever toute ambigüité quant à la crédibilité de ces formations. L’Etat a l’obligation de sécuriser tous les diplômes. Il n’est pas normal que l’on autorise un promoteur à créer un établissement et à dispenser une formation et que l’on s’abstienne de reconnaître les diplômes qu’il délivre. De ce fait, il importe de trouver un mécanisme de reconnaissance de ces diplômes.
Aujourd’hui, dans le secteur de l’enseignement supérieur privé, les accréditations s’imposent pour deux raisons distinctes: primo, parce que le secteur doit se développer en toute sérénité pour jouer pleinement son rôle de levier de développement économique et humain. Secundo, parce que nous ne devons pas perdre la confiance des parents qui choisissent ce type d’enseignement (nous reviendrons d’ailleurs sur cette loi dans les prochains articles).
Jusqu’à maintenant, les écoles privées ont démontré leur capacité à former des cadres de haut niveau, rompus aux techniques de gestion, dont un grand nombre a intégré le tissu économique et industriel et apporté une plusvalue. Il leur reste maintenant à intégrer la nouvelle dynamique du paysage de l’enseignement. Cette intégration va ouvrir un autre horizon aux écoles qui peuvent répondre aux nouvelles exigences de la loi. Plusieurs d’entre elles ont déjà préparé leur terrain. Beaucoup d’entre elles trouveront d’énormes difficultés et disparaitront du paysage. Raison pour laquelle l’Etat doit réfléchir avant de lancer le projet, en étudiant les différentes variables du cahier des charges.