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La machine législative est-elle en panne ?

Débat avril 2021

La machine législative est-elle en panne ?

A la fin de la session extraordinaire de la dernière législature du 10ème Parlement du Maroc, et le deuxième depuis la Constitution de 2011, plusieurs textes de lois n’ont toujours pas été adoptés y compris des lois organiques et des lois-cadres importantes. Une occasion de revenir avec Rachid Idrissi Kaitouni et Ahmed Bouz sur la pratique parlementaire au Maroc et les entraves qui y sont liées.

Est-ce qu’on peut parler d’un blocage de la machine législative au Maroc ?
Rachid Idrissi Kaitouni (R.I.K.): Le problème de la production législative est lié d’abord à la morphologie constitutionnelle qui fait que la priorité est donnée au rationalisme constitutionnel, c’est-à-dire à l’exécutif. Le nombre de projets de loi est très important et le nombre de propositions de loi l’est beaucoup moins. D’abord les appareils ne sont pas identiques. Celui de l’exécutif est outillé avec une technostructure qui a existé depuis longtemps au Maroc et qui est très importante. Cette technostructure agissait sur toutes les phases de la production législative.
On va revenir par la suite aux moyens. Mais peut-on parler de blocage ?
Ahmed Bouz (A.B.) : C’est une problématique qui ne concerne pas que le royaume. Au Maroc il y a un excès dans l’initiative gouvernementale dans la production de lois. Jusqu’au point où le parlement a commencé à considérer que l’initiative législative est un domaine réservé au gouvernement. C’est un phénomène international mais qui s’accentue au Maroc où le parlement ne dispose ni des moyens ni de l’expertise lui permettant d’introduire des propositions de loi de haute qualité.
Le Parlement est donc marginalisé par le gouvernement ?
R.I.K. : Pas forcément. Le gouvernement est issu d’une majorité parlementaire. La plupart du temps quand il y a des propositions de loi, l’initiative du texte vient de la majorité en concertation avec le gouvernement. Il n’y a donc pas de coupure nette, en ce qui concerne la production législative par le projet de loi et la proposition de loi. Si je suis un parlementaire représenté au gouvernement, je vais peut-être influer sur un projet de loi que va déposer le gouvernement. Il y a une interpénétration au niveau législatif. Deuxièmement, le principal problème qu’on relève, est que les lois ne suivent pas le rythme. Du fait de la loi et de la Constitution, il y a une préférence pour les projets de loi. Même au niveau de la conférence des présidents du parlement qui les réunit avec le ministre chargé des relations avec le parlement pour l’établissement des priorités législatives, c’est le ministre qui finit par imposer l’ordre du jour de la session parlementaire.
Mais quid du blocage ?
A.B. : Si on prend le blocage dans notre contexte, il y a plusieurs points à soulever. Premièrement, la nouvelle Constitution. Elle a chamboulé le champ constitutionnel et même politique. Elle a imposé un agenda de lois organiques, de lois-cadres et de lois normales pour la rendre effective et les mettre en conformité. C’était parfois au-delà des limites du législateur. Surtout que la constitution a imposé un calendrier à respecter de par l’article 86 qui donne le délai d’une mandature pour produire toutes les lois organiques. Bien sûr le législateur ne l’a pas respecté et quand cela s’est produit, il a émis une interprétation pour donner l’impression qu’il n’a pas violé la Constitution. Cela s’est fait en disant que la Constitution impose juste «la soumission» des projets ou propositions de lois organiques et non leur «adoption». Or, la Constitution ce n’est pas seulement ce qui est écrit. Il y a ce qu’on appelle l’esprit de la loi. Les membres de la commission, présidée par Abdellatif Mennouni qui a planché sur le texte constitutionnel, quand ils ont prévu cet article 86 qui limite la durée pour la promulgation des lois organiques, avaient à l’esprit une pratique nuisible au travail parlementaire. Comme par exemple la loi organique sur la grève, prévue depuis 1962 et qui n’a pas encore été adoptée. C’est pour éviter ce genre de situation que cet article a été introduit dans la Constitution. A travers l’interprétation émise par le parlement, et non le tribunal constitutionnel, nous sommes en train de refaire la même expérience alors que nous avons épuisé la deuxième législature après la Constitution, c’est-à-dire 10 ans. Et ce n’est pas que la loi organique sur le droit de grève qui n’a pas été adoptée. Plusieurs lois organiques restent en suspens. Dans de nombreuses expériences constitutionnelles, une prérogative est attribuée à la justice, c’est celle du «déni législatif». C’est dans le cas où le parlement ne fait pas son travail. La justice l’interpelle sur les raisons qui ont fait que le parlement n’adopte pas une loi alors qu’elle est prévue dans la Constitution. Dans plusieurs pays, le droit constitutionnel a pour prérogative de surveiller ces dénis législatifs. Cette prérogative n’existe pas au Maroc, ce qui cause problème. Le code du travail est resté au parlement de 1978 à 2003. Le code pénal est encore bloqué depuis 2016. Ce n’est peut-être pas que de la responsabilité du parlement uniquement, mais c’est un problème surtout avec le contexte et l’esprit de la Constitution de 2011.
R.I.K. : Ce qui est sûr c’est qu’il y a un processus où il y a diverses entraves successives. Cela revient du choix des parlementaires par les partis politiques et leurs formations. Il est quasiment impossible au Maroc qu’un parti vienne et dise: ce professeur de droit constitutionnel va me servir… Dans certains pays, il y a des parlementaires qui restent inamovibles à leur poste car les partis par consensus veulent qu’ils restent à la tête de commissions pendant plusieurs mandatures parce que ce sont des références dans leurs domaines et qu’ils apportent une plus-value à l’action parlementaire. Quand on met à la tête de la commission de la justice et de la législation un commerçant, on se dit mais où on va? Quand on emploie dans l’administration du parlement sur la base d’une distribution partisane on est dans la distribution de rente. Quand on constitue des commissions de consultation au sein de l’hémicycle et que c’est systématiquement remis en cause sur des bases partisanes, on ne cherche pas l’efficacité mais la représentation… Depuis que j’ai intégré le parlement, j’ai plaidé pour un institut d’étude et de recherche en lien avec l’association de droit institutionnel pour assurer une profondeur académique. Et ce ne sont pas seulement les 233 lois non votées qui posent problème. Il y a des milliers de lois qui sont là depuis 1912. Des lois coloniales complètement déphasées qui doivent être revues. Ça a été fait par l’Italie pour «dé-fasciser» leur corpus légal. Dans tous les parlements il y a des embouteillages.
A.B. : Les raisons de ces embouteillages sont nombreuses. On a parlé de l’agenda constitutionnel, de la formation et de l’expérience législative… Il y a aussi des raisons politiques liées à la nature de chaque loi. Ce ne sont pas toutes les lois qui sont bloquées, et ce ne sont pas toutes les lois qui sont lentes à l’adoption. Si on prend l’exemple du code de travail ou de la loi organique de la grève ou des syndicats, ce sont des problématiques politiques, liées aux désaccords fondamentaux entre les syndicats et le gouvernement, ou entre les divers courants politiques. Par contre, il y a un phénomène nouveau qui a été relevé ces dernières années. C’est le calcul politicien de certains partis qui veulent faire rater l’opportunité à d’autres partis de la majorité ou de l’opposition de faire passer des lois à la veille d’élections. Je ne peux pas accepter en tant que parti de faire passer une loi à portée sociale qui va être comptabilisée au profit du parti qui mène le gouvernement. C’est un phénomène nouveau. Comme tout le monde sait, à la veille de chaque élection, le gouvernement cherche à faire passer le maximum de lois pour montrer son efficacité. Il y a d’autres raisons, liées aux divergences politiques comme ce qu’on a relevé pour le code de la route où il y a eu énormément de débats. Il y a aussi le lobbying, même si c’est très difficile de parler d’un lobbying institutionnalisé dans notre pays. Mais on voit qu’il peut se manifester dans certaines lois, comme ça a été le cas dans le cadre de la loi sur les pharmaciens, les avocats, les opticiens, etc. Et ce phénomène peut freiner le «moulin» législatif.
Il y a certaines propositions de loi déposées par l’opposition qui ont systématiquement été refusées par le gouvernement comme c’est le cas de la nationalisation de la Samir par exemple…
R.I.K. : Toutes les problématiques n’ont pas des réponses uniquement législatives. Il y a ce qui relève du droit et ce qui relève de la règlementation. Nous assistons à une crise profonde de l’assimilation du domaine de la loi. Nous assistons par exemple à des amendements apportés par les députés, et qui sont adoptés, mais qui sont liés plus au domaine règlementaire.
Dans ce sens, est-ce que les parlementaires ont des staffs à même de faire la distinction ?
R.I.K. : Quand j’étais secrétaire général du parlement, nous préparions des paquets pour chaque séance, avec des dizaines de pages de documents, ce qui, à la fin, faisait des milliers de feuilles. On les distribuait à tous les parlementaires. A la fin des sessions législatives, nous ramassions les déchets des parlementaires. Figurez-vous que nous retrouvions beaucoup des paquets que nous distribuions intacts. Ils n’ont même pas été déballés, encore moins lus.
C’est-à-dire ni par le parlementaire ni par les staffers ?
R.I.K. : Personne. Pire, ces mêmes parlementaires qui n’ont pas lu les documents prennent la parole pour intervenir sur la loi…
A.B. : C’est une question fondamentale. Quelle est la procédure de sélection des staffers? C’est soit l’appartenance partisane, soit la relation personnelle avec le député. Les choix basés sur la compétence sont très rares. Et cela nous renvoie encore à l’initiative législative. Ces initiatives doivent venir de parlementaires bien équipés, qui ont des conseillers, des équipes etc. Comment demander à un parlementaire de travailler sur une proposition de loi encore moins qu’elle soit de qualité? Pour revenir au blocage, il y a parfois des blocages qui viennent de la méthodologie choisie. Si on prend par exemple la loi sur la mutualité, qui est une loi qui rentre dans le domaine de la protection sociale. Il y avait une divergence profonde entre les groupes parlementaires. Il y en a certains qui estimaient que cela devait passer par le processus du dialogue social, il y en a qui disaient qu’il peut passer directement par le parlement. Concernant la loi sur les syndicats et celle sur la grève, les syndicats pensent que ce sont deux lois liées et qu’elles doivent être discutées ensemble dans le cadre du dialogue social. Et le problème n’est pas lié à la loi sur la grève, mais à la loi sur les syndicats qui remet en cause quelques points sur lesquels les syndicats sont intraitables comme la responsabilité des retraités au sein des syndicats, l’alternance à leur tête, ou encore les financements des syndicats. Ce sont ces points qui bloquent la loi sur le droit de grève dont le vote est conditionné par les syndicats en échange de la prise en considération de leurs demandes concernant leur propre loi organique.
R.I.K. : Il y a des points comme ça qui sont liés à la politique. On essaye de noyer le problème pour ne pas le traiter. Le rôle du parlement c’est de légiférer, pourquoi je renvoie ça au dialogue social. Nous avons des institutions comme le Conseil Economique et Social dont c’est la fonction de trouver des compromis à travers le débat. Et là, ça nous renvoie plus largement au texte constitutionnel qui était plus un marché de compromis. Comment je vais ramener les syndicats ou la CGEM et leur donner une place au parlement. C’est un groupe de pression sur les acteurs politiques, ce ne sont pas des législateurs. Ce choix ouvre la voie à ce genre de négociations interminables amenant aux blocages.
A.B. : A la base, la deuxième chambre ou Sénat se fait sur la base d’une représentativité régionale et non socioprofessionnelle ou catégorielle. C’est une particularité marocaine pour ne pas dire une aberration. C’est une particularité des pays avec un déficit démocratique comme en Egypte où il y a une représentation des agriculteurs au parlement. La place naturelle des syndicats et du patronat est au CESE, ou au sein des conseils de dialogue social.
R.I.K. : Effectivement. Comment peut-on être pour la défense de l’intérêt général alors qu’on représente une corporation ?
Mais comment expliquer qu’il y ait des lois qui ne prennent pas plus de 3 mois à voir le jour et d’autres qui restent 60 ans ?
A.B. : Il y a beaucoup de raisons qui font que des lois passent comme on dit en «aller simple». Il y a ce qui est objectif, et ce qui est subjectif. En général, les lois qui sont incluses dans les discours royaux suivent cette voie. Il faut une volonté royale, voire qu’il en fixe les délais. C’est le cas par exemple aujourd’hui de la loi sur la couverture sociale. Les lois où c’est le ministère de l’Intérieur qui est initiateur bénéficient aussi de cette célérité. Surtout celles qui sont débattues dans la Commission de l’Intérieur au Parlement. Ce sont en général des lois électorales. Il y a d’autres lois qui sont préparées en amont avec un consensus préétabli. Par contre, les lois où il y a un lobbying qui est exercé contre leurs contenus sont ralenties, jusqu’à intégration d’amendements qui parfois vident la loi de sa substance. Donc, les lois controversées sont naturellement retardées, contrairement à des lois «imposées» par des agendas précis. Les conventions internationales sont dans ce cas. D’ailleurs ces conventions peuvent représenter près de 40% de l’ensemble des lois d’une session.
R.I.K. : Si on revient sur ce point, de dire que cette loi est voulue par le Roi ou pas, c’est une manière de noyer les responsabilités. Parce que le Roi donne ses orientations, il ne confectionne pas les lois. D’autant plus qu’actuellement, le Roi n’intervient même plus dans les lois de Finances puisqu’il ne supervise que les orientations générales. Ce qui veut dire que c’est l’incompétence qui fait dire aux uns et autres que c’est une loi que veut le Roi. Aujourd’hui, il n’y a aucun parti qui donne une vision d’ensemble. On attend que la Commission sur le nouveau modèle de développement nous donne cette vision. Si on attend que les lois viennent du Roi pour être efficace, c’est problématique. Parce que SM fait des discours de dynastie, pas des discours pour la gestion courante. C’est le travail des partis. On est en train de dribler. On est dans une sorte de paresse législative et intellectuelle.
A.B. : On n’a même pas un Plan législatif. Il a été adopté pour la première législature, mais pas pour l’actuelle.
R.I.K. : Il ne s’agit donc plus de parler de retards législatifs. C’est un problème beaucoup plus profond. Un problème d’élites. Quand je parle de paresse, c’est qu’il n’y a même pas la volonté de faire. Quand aujourd’hui on parle à un chef de parti politique, sur une problématique particulière, il répond qu’il espère juste régler ce qu’il a sur la table. Nous donnions une dotation aux membres du bureau du parlement pour acheter des journaux, il s’est avéré qu’elle a plus servi à acheter des cigarettes chez un buraliste de Rabat. Qu’est-ce que ça veut dire?
A.B. : En relation avec ça, il y a la problématique de renouveau des élites. Si on prend «la photo de groupe» du parlement depuis 2011, elle a changé. Il y a de nouvelles figures. Mais la question qui se pose est: est-ce que la finalité est de changer les figures ou les contenus? Dans beaucoup d’expériences parlementaires, le député ayant réussi est celui qui a pu accumuler plusieurs mandatures lui ayant permis de gagner en maturité. Ça devient des références. Le renouveau est devenu un discours politique et idéologique. Comme si la finalité est le renouveau en lui-même et non pas celui des pratiques. Si on prend par exemple le quota des femmes, une députée passe 5 ans au parlement, elle commence à peine à apprendre et voilà qu’elle n’a plus le droit de passer par le quota de par la loi. Est-ce qu’on veut un changement qui va dans le sens de la qualité ou est-ce qu’on veut juste prendre un selfie? Le renouveau doit être au niveau des idées, de l’effort, de la créativité pour dépasser deux problématiques essentielles: la paresse législative, comme ça a été cité et l’attentisme. Quand on revient à l’attente des orientations royales. Partout dans le monde, les chefs d’Etat ont des prérogatives d’orientation législative. Si on prend l’exemple (extrême) des États-Unis où le Président, lors de son discours sur l’état de la l’Union, peut donner des orientations au Congrès, et c’est à celui-ci de voir s’il veut les prendre en considération ou pas. La reine d’Angleterre lit devant la Chambre le discours rédigé par le Premier ministre. On ne peut pas uniquement attendre ce que va dire le Roi, et se transformer en une salle d’attente.
Si on revient à la question du blocage, souvent on parle du Secrétariat Général du gouvernement (SGG) comme une boîte noire qui bloque les lois…
R.I.K. : Si on s’adresse à Ssi El Hajjoui [Secrétaire Général du Gouvernement, NDLR], il va répondre qu’il a 43 personnes qui travaillent avec lui. Il faut une dynamique plus large conduite au sein même du parlement pour améliorer le rendement et la qualité des lois. C’est pour ça que j’ai parlé tout à l’heure de l’institut d’étude et de recherche. Il sera chargé de créer des comités ad hoc sur les différentes lois et les améliorer. C’est ce qui va faire que le SGG ne va plus être un cimetière de lois. C’est ce qui va créer une densité de savoir à même de booster le travail parlementaire et aussi de favoriser l’émergence d’une expertise au sein même du parlement. Un moyen aussi de contrôler les parlementaires et leur rendement en les poussant à plus de productivité et de rigueur.
A.B. : Je pense que cette période où on parlait du SGG comme d’une boîte noire est aujourd’hui dépassés. Il y avait des enjeux politiques à l’époque, qui sont aujourd’hui dépassé. Je n’irais pas jusqu’à dire qu’il y a eu une réconciliation entre le législateur et le SGG mais le problème, ce n’est pas le SGG aujourd’hui. Parfois, on commence à demander une plus grande ingérence du SGG pour éviter de trouver des lois où les normes législatives ne sont pas respectées. Des lois avec des mots et des expressions beaucoup plus proches de la prose que des textes juridiques. La production législative a sa langue et ses expressions. Le fait qu’à une époque le SGG centralisait tout avait ses avantages. Bien sûr, il y avait des inconvénients. Mais quand on éclate le processus législatif ça crée des problèmes. On voit très bien la différence quand un texte législatif qui est issu de A à Z du SGG et des lois produites par les services juridiques des départements ministériels ou leurs consultants. Et on se pose la question à quel point ces consultants ou ces services juridiques ont les compétences et l’expertise pour produire des lois.
R.I.K. : Je pense qu’avec la nouvelle architecture où c’est le ministère des Finances qui a absorbé celui de la réforme de l’administration et des affaires générales, il faut un plus grand dialogue entre le SGG et le secrétariat général du Parlement. Avant, le SGG avait un plus grand poids mais avec de gros calibres qui pouvaient refuser des lois car elles ne répondaient pas aux normes ou qui étaient superflues. Et il fallait négocier entre l’administration du parlement et celle du SGG pour les améliorer.
C’est donc un problème d’architecture institutionnelle…
A.B. : En tout cas ce n’est pas un problème d’arsenal juridique. C’est vrai que ce dernier a besoin de temps en temps de dépoussiérage, même si le droit constitutionnel a besoin de stabilité pour établir des pratiques et épuiser les ressources des textes existants. Ce n’est pas un problème uniquement juridique. Il y a des éléments de mentalités, de la volonté politique et partisane, des centres de pressions sur le producteur de la norme comme la société civile, la presse, etc. qui ont besoin d’un renforcement de compétence pour remplir pleinement leurs rôles. Le problème du blocage n’est pas uniquement technique ou juridique. Les procédures des partis politiques pour le recrutement de leurs candidats doivent être revues. Je prévois d’ailleurs, et j’espère que je me trompe, qu’on va revenir aux notabilités dans les prochaines élections. Et ça c’est un retour en arrière. Moins de politique, moins de programmes, moins de choix en faveur des mouls choukaras. Et ce n’est pas la représentation qu’on se faisait du notable d’il y a longtemps. Ça peut être un médecin, un avocat ou un ingénieur. C’est une question de mentalité, de favoriser des gens capables d’investir de leur argent dans une campagne électorale pour assurer une présence numérique, plutôt que des profils partisans.
R.I.K. : Il y a un problème institutionnel posé par l’article 47 de la Constitution où on est condamné à avoir une majorité de personnes pas d’idées. Par ailleurs, il y a un vide politique qui n’est pas rempli. Il y a une lâcheté politique où chacun cherche à jeter la patate chaude que ce soit en termes législatif ou exécutif et dans les domaines les plus stratégiques aux plus triviaux.