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La solution miracle?

Entreprises novembre 2019

La solution miracle?

La tant attendue réforme de la Bourse de Casablanca prend de plus en plus forme avec la publication du règlement général au Bulletin officiel. Serait-ce suffisant pour redynamiser le marché?

C’est à un véritable big bang que se prépare la Bourse de Casablanca pour le début de l’année prochaine. Le règlement général de la Bourse de Casablanca, publié au Bulletin officiel en août dernier, introduira une nouvelle organisation des compartiments du marché et autorisera enfin la cotation des OPC. Cette nouvelle version du règlement représente une avancée majeure dans la modernisation du marché boursier marocain. En effet, les nouvelles dispositions prises confèrent à la Bourse de Casablanca plus de flexibilité dans la mise en place des outils nécessaires au développement du marché. Cette flexibilité permettra de s’adapter plus aisément aux attentes des émetteurs et des investisseurs nationaux et internationaux. ...Retrouvez l'intégralité de l'article dans le Numéro chez votre marchand de journaux Ou achetez la version digitale

Cependant, la question qui se pose est de savoir si ces différentes mesures vont réussir à changer la donne pour la Bourse et la sortir enfin de sa léthargie? Il faut en effet rappeler que cela fait 10 mois que la corbeille n’a pas accueilli de nouvelles recrues et quelques exercices que les revenus des sociétés cotées ne sont plus au rendez-vous. D’ailleurs, le premier semestre de 2019 n’y déroge pas. Le directeur analyse et recherche d’une société de Bourse de la place explique, sous couvert d’anonymat, que «le règlement en soi ne peut être vraiment l’élément catalyseur qui va pousser les entreprises à s’introduire en Bourse et à se servir du marché financier parce que même avec le marché alternatif, il y a toujours l’obligation de publier. Elle est certes moins contraignante, mais elle est bien là. Et cela constitue en soi un frein pour certaines entreprises qui préfèrent évoluer en dehors de la cote et se financer au niveau du secteur bancaire». Mais le vrai problème selon lui c’est que «des investisseurs se développent un peu plus rapidement que le marché. Le marché est devenu plus petit que la taille des investisseurs».

Les investisseurs préfèrent l’obligataire

Une opinion que partage également Bachir Tazi, directeur de CFG Bank Capital Markets, qui précise que «malheureusement le marché est très étroit par rapport aux capacités d’investissement des institutionnels au Maroc». Cette étroitesse est telle que la part de l’action dans l’actif net sous gestion au cours des dix dernières années a baissé de manière substantielle non pas en termes de valeur mais plutôt en termes de pourcentage. «Ce qui veut dire que l’obligataire a augmenté de manière beaucoup plus importante que l’action. Les investisseurs préfèrent d’ailleurs aller davantage vers l’obligataire qui offre de la liquidité», comme l’explique le directeur analyse et recherche. Si les deux acteurs sur le marché boursier estiment que dans l’absolu, le nouveau règlement est une bonne chose, pour Tazi, et maintenant que les jalons sont posés, il faudra passer à l’exécution. «Il faut rapidement instaurer le cadre réglementaire et fiscal, installer la chambre de compensation pour le marché à terme, pour donner du sens à cette réglementation et qu’elle ne reste pas que sur le papier et là il y a l’intervention de plusieurs maillons de la chaîne: le ministère, le fisc, la Bourse de Casablanca, les opérateurs du marché pour accompagner cette réforme», précise le directeur de CFG Bank Capital Markets. De son côté, le directeur analyse et recherche estime que «ce n’est pas un cadre réglementaire qui va redynamiser le marché. Il faudrait plutôt mettre en place des incitations fiscales, améliorer son attractivité et offrir la possibilité d’arbitrage. Le marché est aujourd’hui dominé par un seul type d’opérateur, notamment les investisseurs institutionnels, qui ont des intérêts convergents. Or, quand les intérêts convergent, il n’y a pas d’opérations». L’étroitesse du marché est une donne à laquelle s’ajoute également le manque d’alternatives qui permettraient d’arbitrer entre plusieurs produits. «L’introduction de nouvelles classes de produits avec le nouveau règlement ne peut qu’être bénéfique dans l’absolu, mais il faut passer à l’exécution et il faut le faire rapidement», explique Tazi. Notre directeur analyse et recherche estime, de son côté, que «les OPC sont une réponse à cette absence d’alternatives dont se plaignent les investisseurs mais ça va créer un marché concurrent à celui de l’action».

OPC pour OPCI

S’agissant de la cotation des OPC, un gestionnaire de fonds sous couvert d’anonymat estime que le texte est fait essentiellement pour les OCPI qui sont peu liquides. «Quand un investisseur souhaite racheter ses parts dans un OPCVM, le gestionnaire de ce dernier peut facilement vendre le sous-jacent, action ou tout autre titre de dette, pour dégager de la liquidité, ce qui n’est pas aussi évident pour les OPCI dont le sous-jacent est un actif immobilier difficile à vendre. Quant à la cotation des OPCVM je n’en vois pas l’intérêt. Nous disposons d’une cotation quotidienne et hebdomadaire des valeurs liquidatives et nos investisseurs n’ont pas besoin de s’adresser à un marché secondaire pour racheter leurs parts». En revanche, une cotation des OPCVM ne pourrait constituer qu’une véritable lourdeur en termes de gestion administrative et même en termes de communication qui doit se renforcer. Dans l’état actuel des choses, les OPCVM marchent très bien et progressent. Du côté des gestionnaires des fonds de Placement Collectifs en Titrisation, un opérateur sous couvert d’anonymat explique que ces titres sont admis à la cote depuis plus de 10 ans, étant composés d’obligations. Cependant, l’absence de la cotation de ces titres est à vérifier auprès des investisseurs eux-mêmes qui choisissent les obligations non cotées au lieu de celles cotées. Quant au vrai problème des FCPT, il est plutôt d’ordre réglementaire. Ces titres, bien qu’ils soient des titres de dette, ne sont pas admis en repos, ni en prêt emprunt de titres contrairement aux bons du Trésor qui, grâce à ces possibilités, sont plus liquides. Conséquence? Les investissements en FPCT ne représentent que 2% chez les compagnies. De même, chez les OPCVM, l’exposition aux dettes privées est limitée à 20%. Sauf que dans ces 20% se retrouvent les bons du Trésor, les obligations, les titres de créance négociables et enfin les FPCT. Dans ce cas, il faudrait plutôt revoir d’autres textes pour améliorer la liquidité des FPCT. S’agissant de la réforme, les différents intervenants s’accordent à dire que le fait d’avoir des compartiments ne serait pas pour que le marché reprenne des formes. Il faut plutôt travailler sur l’amélioration de la profondeur avec l’introduction de nouvelles sociétés. Lourd défi qui n’a été que faiblement relevé par le passé. Y arrivera-t-on cette fois-ci?