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La hausse qui fait peur

Entreprises décembre 2014

La hausse qui fait peur

Une étude est en cours de lancement par l’ANP pour y voir plus clair. Mais, vue l’ancienneté du système tarifaire actuel datant de 1996, les opérateurs affichent des craintes quant à la hausse des prix.

L’ANP va revoir ses tarifs. Il fallait s’y attendre surtout que l’actuel système tarifaire date de 1996, soit dix ans avant la création de l’Agence. Mais, avant de passer à l’acte, il est dans l’air du temps de commanditer une étude assortie bien entendu de benchmark international pour servir d’argumentaire scientifique auprès de la tutelle mais surtout auprès des usagers des services portuaires. Cela bien que Nadia Laraki, directrice générale de l’ANP, assure que «la concertation avec les concessionnaires et les usagers portuaires se fera avant tout changement tarifaire». Un changement à la hausse ou à la baisse? Difficile de se prononcer avec exactitude dès aujourd’hui. Quant aux résultats de l’étude, ils ne devront pas voir le jour avant la fin 2015 selon un responsable de l’ANP.  Mais ce que  l’on sait déjà est que «cette refonte n’est pas synonyme d’une hausse des tarifs. Il s’agit d’un reengineering complet du système tarifaire pour l’adapter aux nouvelles exigences et mutations de l’environnement», dixit Laraki. Mais du côté des professionnels, on appréhende le pire.  «Déjà aujourd’hui la grille tarifaire n’est pas normale. Si on la revoit à la hausse cela risque de rendre les armateurs mécontents, et ça pourrait diminuer la compétitivité de notre secteur à l’échelle international», s’emporte Mohamed Karia, président du Comité central des armateurs marocains (CCAM). Un argument compétitivité qui ne risque que de peu gêner l’ANP en cas de révision à la hausse vu que le pavillon marocain n’existe pratiquement plus si ce n’est la flotte IMTC du même commandant Karia composée de 14 bateaux.

Valoriser les ressources
En tout cas, de toute évidence, le nouveau chantier ANP n’est pas une décision isolée. Cette volonté de revoir les tarifs s’inscrit dans un contexte économique et politique plus global. Ce dernier est marqué par la pression sans précédent sur les Finances de l’Etat. Ces dernières ayant été notamment sollicitées pour la réalisation des grandes infrastructures logistiques, les autoroutes mais aussi et surtout les ports. Pour rappel Tanger Med a coûté à l’Etat 82 milliards de dirhams dont 20 milliards de dirhams pris directement sur le budget général.  Il faut également avoir à l’esprit une volonté de plus en plus marquée auprès de l’Exécutif de mieux valoriser les ressources de l’Etat. A ce niveau, il y a lieu d’évoquer la refonte du système de gestion du foncier public mais aussi, en relation avec le portuaire, la décision du département Rabbah de reprendre la main sur le domaine maritime pour en faire un outil de développement aussi bien des projets relevant de ce ministère que du pays en général. Le ministre a estimé que la cartographie de ce domaine sera claire au plus tard en 2015 faisant savoir que son département œuvre pour la réalisation d’un système d’information dédié à organiser et inventorier «l’occupation» de ce domaine d’une manière aussi légale (par le biais de permis) qu’illégale. Ceci permettra d’identifier une carte en la matière, vis-à-vis des investisseurs et de l’ensemble des secteurs professionnels.
Sur un autre plan, l’ANP souligne le saut qualitatif qu’a connu la qualité des prestations portuaires depuis la mise en œuvre de la loi 15-02 particulièrement la consécration de l’unicité de la manutention ce qui s’est traduite par une amélioration intéressante de la productivité. Cette accélération des cadences de manutention se traduit par des gains importants  qui sont procurés à la fois aux armateurs et aux chargeurs. Autrement dit, ces gains de productivité permis par l’ANP au profit de ses clients devraient être reflétés au niveau du prix. Un argument des plus irréfutables dans l’optique d’une hausse des tarifs. A travers l’étude ANP, tous ces éléments seront démystifiés, challengés par rapport aux contextes portuaires régionaux. Concrètement, la démarche de construction du nouveau système tarifaire, tiendra compte des résultats du diagnostic de la situation actuelle et des enseignements tirés à partir d’un Benchmark à l’international des systèmes tarifaires des droits de port. Si aujourd’hui le cabinet qui sera en charge de l’étude ne peut réaliser un benchmark avec les ports africains, notamment ceux de l’Egypte, la Tunisie ou encore la Libye, vu le contexte politique particulier que vivent ces derniers. Il resterait donc un spécimen de pays du nord du bassin de la méditerranée. Ces derniers disposent dans tout les cas de droits de ports beaucoup plus chers, mais aussi de services beaucoup plus compétitifs que ceux existants au Maroc. «Si les ports européens sont plus chers, ils ne sont pas moins compétitifs vu la qualité des services qui y sont offerts», assure un spécialiste du secteur.

Quel impact sur Tanger Med ?

Qu’en sera-t-il des droits de port exercés au niveau du complexe portuaire de Tanger Med si ANP change ses tarifs? A priori aucun impact puisque celle-ci n’a aucune autorité sur le port containers du détroit. Ce dernier est exclusivement géré par Tanger Med Port Authority (TMPA) qui y exerce les missions et prérogatives publiques relatives à la gestion et au développement du complexe portuaire et agit par conséquent en qualité d’Autorité portuaire. Il faut toutefois souligner que les acteurs portuaires avaient exprimé leur mécontentement quant aux prix jugés chers exercés par TMPA. Cette s’était alors défendue en assurant que «le coût de la traversée pour un camion TIR a baissé en passant de 450 euros en 2009 à 220 euros en 2013», selon Najlaa Diouri, la directrice générale de TMSA. Une baisse qui est due essentiellement à la réduction de la distance de traversée suite au transfert des activités passagers et roulier du port de Tanger-ville vers Tanger Med en 2010. Chose que semble remettre en cause ce professionnel portuaire qui déclare sous couvert d’anonymat que «Tanger Med surclasse les ports espagnols et même les autres ports marocains en termes de surestaries». Chose qui semble donc desservir Tanger Med notamment face à son concurrent immédiat d’Algesiras. Cela d’autant plus que le gouvernement espagnol applique depuis 2012 des bonifications et des réductions des tarifs des services réguliers de transport maritime en vue d’encourager les armateurs à ouvrir des lignes régulières passagers et frets.