Le Maroc se fait un nom
La dynamique qu’a créée la nouvelle stratégie portuaire avec le lancement de méga-projets a profité aux entreprises marocaines spécialisées dans les travaux maritimes et portuaires… Elles sont aujourd’hui aussi agressives que leurs concurrentes étrangères…
Le secteur portuaire et maritime marocain est considéré comme un nouveau débouché pour le Maroc. Les donneurs d’ordre, comme les opérateurs privés, sont en phase de modernisation et de renforcement de leur expérience. Mais, il faut dire qu’en un laps de temps court, les entreprises marocaines ont atteint une certaine expérience très respectable. Il y a à peine quelques années, et plus précisément au moment du lancement du projet de Tanger Med I, les opérateurs marocains spécialisés dans la conception et la construction des ports étaient une monnaie rare. «Si on prend la conception et la construction des ports, ce ne sont pas des opérateurs marocains qui ont construit le port de Tanger Med I, mais il faut dire qu’au fil des années, la maîtrise d’ouvrage marocaine dans ce domaine s’est constituée et se développe actuellement à un rythme effréné», explique Michel Titecat, consultant spécialiste dans les affaires maritimes et portuaires. D’ailleurs, c’est dans cette dynamique que la société Tanger Med Engineering (TME), filiale de la TMSA, a vu le jour et travaille aujourd’hui sur plusieurs projets dont celui du port de Tanger Med II. Vu le potentiel énorme qu’offre le secteur portuaire et maritime marocain, l’OCP, de son côté, a créé la joint-venture Jesa avec l’américain Jacobs Engineering, spécialisé, entre autres, dans la conception et la construction des grands œuvres. «La tendance qui émerge depuis quelques années dans notre secteur réside dans la recherche d’une ingénierie capable de prendre en main les projets depuis leur conception jusqu’à leur réalisation et leur maintenance. Le secteur public se concentre de plus en plus sur sa mission première consistant à définir et mettre en œuvre la stratégie nationale en la matière et le secteur privé n’a pas vocation à développer une ingénierie opérationnelle dans la réalisation de ses propres projets», affirme Youssef Imghi, directeur général de TME. Des sociétés marocaines telles Somagec, SGTM, ou encore EMT gagnent de plus en plus la confiance des donneurs d’ordre. D’ailleurs, elles sont présentes actuellement sur plusieurs projets portuaires.
Plus de spécialisation
Il est clair que le Maroc a développé une expertise importante dans plusieurs domaines liés au secteur maritime et portuaire, dont notamment le dragage, l’équipement des ports, la maintenance et la formation aux métiers du maritime. Dans ce cadre, il est important de souligner le travail important qu’effectue la jeune agence nationale des ports à l’international et plus particulièrement en Afrique. «Le Maroc, à travers l’ANP, est de plus en plus sollicité par les pays africains, notamment sur l’aspect de la réforme portuaire et l’application des nouvelles normes maritimes. Nous avons des expériences au Sénégal, au Cameroun, en République du Congo, au Soudan et en Gambie. Nous offrons une assistance technique à ces pays, notamment sur les aspects liés à la maintenance, la sécurité et l’équipement», note Mohamed El Kaddioui, chargé de la coopération internationale au sein de l’ANP. A noter que l’Institut de formation aux métiers portuaires reçoit régulièrement des délégations africaines. Cet institut a été doté récemment d’un simulateur qui a nécessité un investissement de 5,3 millions de dollars et qui permet, entre autres, des formations à temps réel sur les engins. De son côté, Drapor se considère aujourd’hui comme un acteur africain dans les domaines du dragage, de réhabilitation environnementale et de génie maritime.
L’ouverture sur l’Afrique
Pour Michel Titecat, il est trop tôt de parler d’un marché portuaire et maritime africain où le Maroc pourrait se positionner. Pour ce dernier, les ports africains se comptent sur le bout des doigts et les opérations d’échange sont limitées. Un bon nombre de professionnels marocains rejoignent l’avis de Titecat en estimant qu’à ce stade le marché local n’est pas encore saturé et offre plus d’opportunités d’investissement. «Cela ne veut pas dire que l’offre marocaine n’est pas aussi mature pour s’exporter. Il y a une réelle compétence à consulter au Maroc et les opérateurs marocains ont pu accumuler une certaine expérience dans plusieurs spécialisations ces dernières années avec tous les projets structurants qui ont été lancés depuis 2002», précise Titecat. De son côté, Imghi estime que TME dispose donc de compétences de haut niveau ayant l’expérience de grands chantiers à même d’offrir des prestations à la satisfaction de ses clients nationaux et internationaux. Mais, il faut admettre que le Maroc n’est pas le seul sur le marché international et que la concurrence est très rude sur ce marché. Depuis quelques années, l’ANP accompagne les opérateurs privés, dont notamment Marsa Maroc dans leur prospection des marchés étrangers. Le pari du développement à l’international n’est pas encore gagné. Il reste encore du chemin à parcourir.